Dans cette première actualité de la rentrée, notre commission juridique aborde les principaux enjeux de cette réforme annoncée.
➤ Les NEP, une spécificité française
La France demeure le seul pays européen à ne pas avoir adopté les normes ISA alors que l’adoption des normes d’audit internationales est prévue par l’article L.821-11 du Code de Commerce. La France rédige ses propres normes, les NEP qui sont toutefois fondées sur les ISA depuis l’homologation des premières en 2005, à la suite de la LSF (Loi de Sécurité Financière) d’août 2003.
Cette situation soulève une problématique d’homogénéisation entre la France et les autres pays : certaines ISA ne sont pas pleinement retranscrites, et de même pour les NEP, qui intègrent des spécificités nationales.
A titre d’exemples, il n’existe pas dans les ISA d’équivalent à nos NEP 100 pour l’audit des comptes réalisé par plusieurs commissaires aux comptes ou à nos NEP 911 et 912 traitant de l’audit adapté aux petites entreprises. En outre, les normes ISA ne distinguent pas l’audit légal et l’audit contractuel.
Il apparait également un décalage régulier au niveau de l’actualisation de nos normes par rapport à celle des ISA, près de 50% des NEP n’étant pas à jour de l’évolution des normes internationales.
➤ Les ISA, un référentiel plus complet
Les normes internationales comportent 37 normes ISA qui seront à traiter en les complétant ou les amendant pour intégrer les dispositions légales et règlementaires applicables au commissariat aux comptes en France.
Les ISA font davantage référence au jugement professionnel que nos normes nationales, avec une nécessaire documentation du dossier de travail.
Ce référentiel comporte deux normes internationales portant sur la gestion de la qualité « ISQM »⁽¹⁾, avec possibilité de normes nationales au moins aussi contraignantes.
La Chancellerie ou la H2A devront se positionner sur la notion précise du terme « au moins aussi contraignantes » afin de clarifier l’impact et les changements nécessaires potentiels sur nos textes et nos missions.
L’adaptabilité des deux normes qualité à la taille des cabinets constituera sans conteste un enjeu crucial pour les plus petites structures d’exercice professionnel.
Tous les pays ayant adopté les ISA l’ont fait en une fois avec des normes autonomes. Une transposition unique a pour effet de revoir de nombreuses références d’une norme à l’autre et permet de disposer d’un vocabulaire commun engendrant nécessairement des modifications dans nos textes nationaux.
➤ Loi, doctrine et formation : ouverture d’un vaste chantier
Les NEP « sortiraient » du Code de commerce (les ISA ne seraient pas codifiées) sans que la substance des autres articles applicables aux commissaires aux comptes ne soient profondément modifiés, en particulier pour ce qui concerne le co-commissariat, l’alerte, la révélation au Procureur de la République ou la lutte contre le blanchiment.
Il conviendra bien entendu de prévoir une mise à jour de la doctrine professionnelle (Notes d’Information, avis techniques, communiqués, bonnes pratiques professionnelles, Foires Aux Questions, outils, rapports, exemples de documentation) et des formations, initiales (DEC, CAF-CAC), et continue adaptées.
➤ Conclusion
L’adoption des normes ISA ne constituera pas une révolution puisque les NEP en sont déjà fortement inspirées. En effet, nos règlements couvrent déjà tout du moins en partie ces normes, et nos spécificités françaises seraient maintenues.
Les normes ISA sont complétées par un matériel applicatif plus riche mais nécessitent une documentation importante.
Une telle adoption impliquera de nombreuses parties prenantes au sein de la CNCC, de la H2A, de la Chancellerie avec in fine la Commission de normalisation de la H2A pour une durée des travaux préparatoires estimée à 2,5 ans.
A la suite de ces travaux, un délai d’application de 2 ans minimum à compter de la publication du référentiel normatif serait nécessaire pour la préparation des professionnels et de leurs structures, tant en matière organisationnelle que de formation.
Selon ces hypothèses, ce nouveau référentiel entrerait en vigueur en 2030.
⁽¹⁾ : ISQM 1 « Gestion de la qualité par les cabinets qui réalisent des audits ou des examens limités d’états financiers, ou d’autres missions d’assurance ou de services connexes » et ISQM 2 « Revues de la qualité des missions »